Vanessa, 38 ans, partage son nouveau quotidien depuis sa surdité bilatérale.
Les témoignages présentés ici sont des expériences personnelles et ne représentent pas nécessairement les positions officielles de la Fondation Pour l'Audition. Chaque personne s'exprime librement afin d'illustrer la pluralité des expériences liées aux surdités.
Je m'appelle Vanessa, j'ai 38 ans et je suis maman de cinq enfants. En mai 2024, j'ai été frappée par un bouleversement inattendu : je suis devenue sourde bilatérale à la suite d'une grave infection et d'une négligence dans ma prise en charge.
Avant même de perdre complètement mon audition, j'avais déjà commencé à apprendre la langue des signes. J'ai tout essayé : des appareils auditifs aux implants qui, hélas, ont dû être retirés. Rien n’a fonctionné, et aujourd'hui, je me retrouve prisonnière d'un monde entre deux réalités : celui des entendants et celui de la surdité.
Mon quotidien est un véritable défi. Communiquer avec mes enfants, ma famille, ou simplement le monde extérieur devient une épreuve. J'essaie de trouver des solutions : j’oralise, j'utilise des transcripteurs, j’écris, je mime, j’utilise la langue des signes.
J'ai toujours été une personne indépendante, capable de prendre soin de moi et de mes enfants. Mais maintenant, cette indépendance s'estompe. Je ressens une douleur profonde face à cette dépendance que je dois à autrui. Les activités que j'aimais sont désormais limitées : aller au cinéma, aux concerts, participer à des célébrations, assister aux spectacles de mes enfants à l’école… Tout cela me pèse, car je veux être présente pour eux, mais je me sens exclue.
Devenue sourde à 37 ans, je parle encore normalement, ce qui rend ma réalité encore plus difficile à comprendre pour les autres. À chaque fois que j’explique ma situation, je suis confrontée à des réactions qui me blessent : « Mais tu parles, donc tu entends, non ? » ou « C’est une blague, n’est-ce pas ? Moi aussi, je fais semblant d’être sourd quand ça m’arrange ! » Cette nécessité de se justifier sans cesse est épuisante et dévastatrice.
Quand une épreuve telle que celle-ci vous frappe avec la brutalité d’un couperet, vous prenez pleinement conscience des difficultés du quotidien. Personne n'est préparé à cela et souvent, nous nous sentons seuls, mal ou peu accompagnés.
Et que dire du monde du travail ? Comment retrouver ma place ? Je me demande chaque jour dans quel domaine je pourrais m'engager sans m'imposer de nouvelles barrières. Trouver ma place dans le monde, tout en étant tiraillée entre deux réalités, me semble être un combat sans fin.
Je suis là, au cœur de cette lutte, cherchant à naviguer dans un monde qui m’est devenu étranger. Je rêve d’un avenir où l’acceptation et la compréhension prévalent, où chacun aurait sa place, qu’il soit sourd ou entendant.
Merci de m’avoir lu.
