Charlotte, 14 ans, partage son quotidien et ses défis en tant qu'adolescente sourde appareillée
De Charlotte C.
Les témoignages présentés ici sont des expériences personnelles et ne représentent pas nécessairement les positions officielles de la Fondation Pour l'Audition. Chaque personne s'exprime librement afin d'illustrer la pluralité des expériences liées aux surdités.
Bonjour, je m'appelle Charlotte C., j'ai 14 ans. Je suis sourde profonde bilatérale de naissance. Actuellement en 3ème, je suis très complexée par mon appareil auditif.
Lorsque j'étais enfant, je ne me rendais pas bien compte de ma surdité. Je savais que j'étais sourde, mais pour moi, ça ne me posait aucun problème, je vivais ma vie normalement et tranquillement. Cependant, depuis le collège, j'ai commencé à avoir peur du regard des autres sur mon handicap. Je voulais à tout prix le cacher de peur que les autres me voient comme quelqu'un de "bizarre", "anormale". Je craignais le rejet des autres ou un traitement discriminatoire. J'ai vraiment commencé à me soucier du regard des autres vers la fin de la 4ème et en 3ème. Je gardais tout le temps mes cheveux détachés pour cacher mon appareil. J'allais même plus loin, je refusais de donner mon micro (aide technique pour mieux entendre) que je donnais à tous mes profs au début de chaque cours. Pour aller le lui donner, il fallait se lever, passer devant tout le monde et supporter les regards des autres sur soi. Je manquais donc parfois de notions importantes de cours et je demandais sans cesse à ma copine de répéter car je n'osais pas le demander au prof.
Je me suis rendue compte beaucoup trop tard que le jugement des gens, on s'en fiche ! Même si cela est dur à accepter (on ne vit que pour le regard des autres mais pas pour le sien), il faut se détacher de cette peur. Moi, j'ai mis beaucoup de temps à l'accepter, et même parfois encore, j'en doute. Je voyais régulièrement une hypnothérapeute pour parler de confiance en soi, du regard des autres, de surdité, etc.
J'ai d'ailleurs oublié de préciser, la surdité ne m'a pas empêchée de me faire des ami.e.s. Certaines personnes se montrent intéressées par le fonctionnement tandis que d'autres vont te traiter normalement, ce que je recherche. Ce que je n'aime pas, ce sont les gens qui ont pitié de toi, qui te traitent différemment, qui parlent d'une certaine façon... C'est très gentil mais ça me met très mal à l'aise. J'ai toujours communiqué normalement en parlant et j'ai toujours été scolarisée dans une école "normale". Ce que je recherche par-dessus tout, c'est le traitement "normal".
Je pense que la surdité ne restreint aucun domaine d'activité à part la natation où il faut enlever ses appareils et les sports de combat, où on peut les casser. Chacun doit pouvoir faire ce qui lui plaît. Personnellement, je fais de la gymnastique rythmique en compétition et tout se passe très bien. Seul bémol, en compétition, la coiffure est encadrée : un chignon haut dégageant le visage, les épaules et la nuque. On voit donc mon appareil. Mais je m'en fiche, la plupart des personnes, voire la totalité, s'en fichent ou alors elles me trouvent courageuse (c'est déjà arrivé que quelqu'un me dise ça !) et je ne les reverrai jamais ! C'est aussi grâce à mon équipe (en GR, on doit présenter en ensemble de 5 à 10 personnes maximum une chorégraphie avec un ou deux engins [corde, ballon, ruban, massues, cerceau]) avec qui je profite du moment présent mais en tâchant de réaliser un bon passage !