Par Denis Le Squer, directeur général de la Fondation Pour l’Audition.
Nous sommes, toutes et tous, concernés par la santé auditive.
Les chiffres sont là, alarmants, devraient nous interpeller et nous imposent d’agir en cette Journée mondiale de l’audition : un Français sur quatre, de 18 à 75 ans, est touché par une forme de trouble de l’audition (Inserm, 2022), tandis qu’un jeune sur deux dans le monde est à risque de développer une forme de surdité de par ses pratiques d’écoute de la musique (BMJ Global Health, 2022)
Toutes les générations peuvent donc être concernées par les surdités et il est nécessaire de préserver son capital auditif. Dans une société où pollution sonore et sons subis ou choisis sont omniprésents, induisant des conséquences irréversibles sur l’audition ou la santé, il est impératif d’agir sans attendre.
Les surdités sont un handicap invisible, peu connu, mal compris, pouvant se produire à tout âge et dont le diagnostic et le premier appareillage sont envisagés tardivement. Ce handicap peut être douloureux, aggravant l’isolement, la solitude, affectant non seulement la qualité de vie, mais pouvant également accroître le risque de déclin cognitif s’il n’est pas pris en charge à temps. Il est important de faire savoir également que la perte auditive est le premier facteur de risque évitable de la démence (OMS).
Pour de nombreuses personnes, les surdités sont un obstacle à l’inclusion et à l’épanouissement personnel et professionnel. Qu’elles soient d’origine génétiques, liées à l’âge, aux effets de la prise de certains traitements ou le résultat d’une exposition prolongée au bruit, elles peuvent parfois passer inaperçues pendant plusieurs années, soit parce que la personne concernée ne réalise pas que son audition décline, soit parce qu’elle cherche à la cacher.
Aussi, la prévention des risques auditifs pour tous, les jeunes, les actifs et les séniors s’avère aussi urgente qu’indispensable.
Prévenir et sensibiliser les enfants à prendre soin de leur audition ne fait pas encore partie intégrante d’un programme d’éducation à la santé dispensé dès le plus jeune âge à l’école. Pourtant, les comportements d’écoute au casque de plus en plus tôt et de plus en plus fort de la part des jeunes, doivent nous alerter.
De plus au collège et au lycée, le bruit est une nuisance très présente et son impact est dévastateur sur la santé des jeunes, en particulier chez les élèves en lycée professionnel, souvent exposés sans protections auditives à l’utilisation de machines bruyantes dans leur vie quotidienne.
Le milieu professionnel n’est pas en reste ; la généralisation des open-spaces sur le lieu de travail depuis quelques années, ainsi que celle du télétravail lié à la crise sanitaire a fait croître l’usage des casques et des écouteurs. Pourtant, le repérage et la prévention des problèmes auditifs sur les populations actives sont très insuffisants en France.
L’audition, parce qu’elle concerne toutes les générations, doit donc être au cœur des engagements d’une politique de santé publique ambitieuse ; or, à l’heure actuelle, seul le dépistage néonatal de la surdité est obligatoirement proposé aux parents.
Pour prévenir la perte de l’audition, un repérage auditif régulier à tous les âges de la vie est le moyen le plus fiable pour prévenir l’aggravation des troubles auditifs.
Surtout, une prise de conscience de chacun quant à la fragilité du capital auditif, unique et précieux, ainsi que l’adoption de mesures simples pour le protéger, sont nécessaires pour profiter de son audition le plus longtemps possible.
Denis Le Squer
Directeur général de la Fondation Pour l'Audition